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26ème dimanche du temps ordinaire
Evangile de Jésus-Christ selon saint Marc
Mc 9, 38...48
Jean, l'un des Douze, disait à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu'un chasser des esprits mauvais en ton nom ; nous avons voulu l'en empêcher, car il n'est
pas de ceux qui nous suivent. »
Jésus répondit : « Ne l'empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n'est pas contre
nous est pour nous.
Et celui qui vous donnera un verre d'eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense.
Celui qui entraînera la chute d'un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu'on lui attache au cou une de ces meules que
tournent les ânes, et qu'on le jette à la mer.
Et si ta main t'entraîne au péché, coupe-la. Il vaut mieux entrer manchot dans la vie éternelle que d'être jeté avec tes deux mains
dans la géhenne, là où le feu ne s'éteint pas.
Si ton pied t'entraîne au péché, coupe-le. Il vaut mieux entrer estropié dans la vie éternelle que d'être jeté avec tes deux pieds dans la géhenne.
Si ton œil t'entraîne au péché, arrache-le. Il vaut mieux entrer borgne dans le royaume de Dieu que d'être jeté avec tes deux yeux dans la géhenne,
là où le ver ne meurt pas et où le feu ne s'éteint pas. »
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Marcher sur deux jambes
Christine Fontaine
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Sauver la vie
Michel Jondot
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Le pour et le contre
Christine Fontaine
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Marcher sur deux jambes
Une histoire vraie
C’est une histoire vraie. Elle se passe en Allemagne juste avant la fin de la dernière guerre. Les américains bombardent le pays et, dans le chaos qui s’installe, des prisonniers français s’évadent du camp où ils étaient enfermés. Ils se dispersent et cherchent des abris en attendant que cessent les bombardements. Un groupe de 5 amis se réfugie dans une grange partiellement effondrée. Ils voient arriver 6 jésuites qu’ils connaissaient. L’espace est trop restreint pour tous. Les derniers venus s’installent dans une autre aile du bâtiment. Les deux groupes sont en vis-à-vis, à une cinquantaine de mètres de distance. Ils ont peur, il fait froid et surtout ils meurent tous de faim. Les 5 amis ont trouvé sur leur route un sac de pommes de terre mais ils n’ont aucun moyen de les cuire. Les jésuites, avec des planches de récupération, font un feu mais ils n’ont pas de nourriture avec eux. Avec son sac de pommes de terre, un homme rejoint ceux qui sont assis autour du feu et leur propose de les cuire et de les partager ensuite entre tous. Évidemment ils sont tout de suite d’accord. L’homme au sac de pommes de terre rejoint son groupe d’amis pendant que les jésuites surveillent la cuisson. Quand une bonne odeur d’aliment cuit à point s’élève, le groupe d’amis s’attend à ce qu’un des jésuites leur apporte, comme convenu, leur part. Mais à la stupéfaction générale, ils les voient manger en un clin d’œil toutes les pommes de terre. Leur propre faim leur a fait oublier celle des autres. Alors l’homme qui avait apporté le sac franchit à nouveau l’espace entre les deux abris et dit aux jésuites : « Je suis catholique mais désormais je ne veux plus entendre parler de votre religion. » Les jésuites se sont tout de suite excusés mais rien n’y fit. Cet homme était croyant mais il ne remit plus jamais les pieds dans une église.
Le déni
« Celui qui entraînera la chute d’un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes et qu’on le jette à la mer. » Le jugement est sans appel ! Effectivement, dans la situation extrême que connaissaient ces prisonniers, les jésuites avaient des mains pour partager et ils se sont accaparé le bien d’autrui. Ils avaient des pieds pour aller vers ceux qui avaient autant faim qu’eux et ils n’ont pas bougé. Ils avaient des yeux mais ils ont oublié de regarder plus loin qu’eux. Les autres étaient portés à faire confiance à des religieux. Ces derniers ont trahi leur confiance et les premiers ont perdu la foi, si ce n’est en Dieu, du moins dans la religion catholique. Jésus rappelle à ceux qui seraient portés à l’oublier que le monde les jugera non sur leurs belles paroles mais sur leurs actes et que ceux-ci ont une portée inouïe : ils peuvent faire perdre la foi à l’un de ces petits.
Mais quel est ce Dieu qui s’en remet à de pauvres humains pour mener les autres à lui ?
Quand Jésus déclare « si ton œil, ta main ou ton pied t’entraînent au péché coupent les », il s’adresse à chacun de ses disciples. Il reconnaît donc que les siens – fût-ce les plus proches – peuvent avoir tendance à ne pas vivre ce qu’ils proclament. Jésus n’ignore pas la faiblesse de ses disciples. Lui, il la connaît parfaitement. Le malheur n’est pas là pour Jésus. Le danger pour les disciples est d’oublier, lorsqu’il est encore temps, qu’ils ont deux mains, deux pieds et deux yeux. Un œil qui regarde vers les autres et un qui ne voit que soi-même. Un pied qui va vers les exclus et un qui ne veut pas y aller. Une main qui veut s’ouvrir pour partager et une autre qui veut garder toutes ses richesses sous le manteau pour ne pas avoir à les distribuer. Nous avons tous tendance à sombrer dans le déni de nos fautes. Là est le vrai danger pour les disciples du Christ. Que nous soyons tous plus ou moins divisés, attirés par un esprit de vie et par des forces de mort, c’est un fait. Mais que nous refusions d’exercer un vrai discernement sur nous-mêmes, c’est là le réel malheur. Celui qui vit dans le déni, court le danger de plonger les autres dans une sorte d’enfer en se croyant déjà lui-même arrivé au ciel ou presque ! Le vrai danger n’est pas d’être pécheurs mais de chercher à se le cacher.
Les vrais croyants
Certes ces jésuites sous les bombardements ont eu grand tort. Ils ont peut-être fait perdre la foi à l’un de ces petits. Leur pied, leur main, leur regard les a porté à oublier les autres. Certes cette partie d’eux-mêmes doit être jetée au plus profond de la mer. Mais le réel danger pour eux comme pour l’Église consisterait à se cacher la portée de ce qu’ils ont fait. Leurs excuses n’ont pas suffi ce jour là à les réconcilier avec ceux qu’ils ont lésé. Cependant le malheur serait qu’ils recommencent jusqu’à s’habituer à prêcher le bien en faisant le mal sans même s’en rendre compte. Les vrais croyants, dans l’Église, ne sont pas ceux qui ne commettent pas de péchés mais ceux qui se réjouissent que leurs péchés ne leur demeurent pas cachés. Il en est parmi nous qui se prétendent purs ou plutôt pécheurs par principe mais sans jamais se remettre en cause. Ceux-là ne sont pas dignes de confiance. Ils ne peuvent pas mener à Dieu ! Que les petits qui croient en Jésus-Christ s’en souviennent afin de ne pas tomber !
Christine Fontaine
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Sauver la vie
Ils ne pratiquent plus
Ils font partie de ceux qu’on appelle, à la suite des sociologues, « des catholiques zombies ». Ils ne sont plus au nombre de ceux que l’on compte parmi les pratiquants alors que voici quelques années ils n’auraient pas manqué leur messe du dimanche. Dans l’Eglise de leur jeunesse, ils ont entendu l’appel du Christ et se sont voulus au service d’un monde plus fraternel. Personne ne les voit plus dans les rassemblements paroissiaux mais ils continuent, au nom de Jésus, à militer pour la justice. Ils choisissent le parti politique qui leur semble le plus apte à défendre le droits des pauvres plutôt que leurs propres intérêts. Ils sont engagés dans la Ligue des Droits de l’Homme ou des ONG humanitaires. Ce sont eux qui sont les plus motivés pour lutter contre le racisme, défendre la cause des immigrés ou le droit d’asile pour les réfugiés. De tels engagements sont à leurs yeux une manière de répondre à un appel : « Suis-moi ! »
Lorsque ces « catholiques zombies » sont amenés, malgré tout, à assister à une célébration, ils ne se dérobent pas. Ils assistent volontiers à une messe de mariage ou aux obsèques religieuses d’un ami. Quel n’est pas l’étonnement de ces personnes lorsqu’au moment de la communion on les empêche de recevoir le Corps du Christ : « Ne vous approchez pas de la Table Sainte si vous n’avez pas fait vos Pâques. » On entend de plus en plus des interdits de ce genre dans nos rassemblements liturgiques.
Est-ce la pratique religieuse qui fait le disciple ? Faut-il se soumettre aux prescriptions strictes de l’Eglise pour se reconnaître croyant ? Ils ne marchent pas à la suite de Jésus ceux qui prennent des libertés à l’égard des rites de notre religion ?
Agir en son nom
C’est à une question de ce genre que répond l’évangile de ce jour. Les disciples sont face à un homme qui lutte contre le mal. Celui-ci a sans doute entendu les appels du Galiléen et compris que la vie s’éclaire quand on se réclame de Lui. Peut-on agir au nom de Jésus sans faire partie du groupe qu’il a institué autour de Lui ? « Nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » La réponse de Jésus est nette ; se référer à Jésus pour que disparaisse le mal, voilà ce qui conduit à évangéliser le monde. Celui qui se réfère au Christ ne peut être, pour le croyant traditionnel, ni un étranger ni un ennemi qu’il faut tenir à l’écart. Celui qui redonne de la lumière à la vie, « celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ». Celui qui se réfère au Christ, pour le disciple, est un frère, promis au même bonheur que lui : « Celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense. »
Décomposition du christianisme
Refuser de tenir à l’écart celui qui ne pratique plus ou qui pratique mal ne conduit-il pas à la décomposition du christianisme ? Ne convient-il pas de sauver l’Eglise en rejetant ceux dont le comportement religieux n’est pas conforme aux prescriptions cléricales et hiérarchiques ? Ne faut-il pas lutter contre le laisser-aller actuel ?
A coup sûr, Jésus refuse le laisser faire. Oui, il y a bien du rejet à opérer pour que l’on puisse aller de l’avant, mais c’est en soi-même qu’il convient de le réaliser. « Viens ! Suis-moi ! » Jésus ouvre la route pour que ceux qui se réfèrent à Lui puissent continuer à le suivre. Les mots désignent la marche : « scandaliser » c’est buter sur une pierre et tomber sur le chemin. A plusieurs reprises, Jésus parle de chutes comme celles qui éliminent les coureurs sur une piste, les privant de la victoire.
Ses paroles sont sévères. Faire tomber quelqu’un sur la route ouverte vers le Royaume, quel scandale ! Terribles sont les mots pour dénoncer l’action de celui qui entrave la marche d’autrui : « Mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes et qu’on le jette à la mer. »
Ne rejetez pas, hors de votre groupe, celui qui s’accroche à mon nom pour sauver la vie. Rejetez en vous ce qui freine l’entrée dans la vie. Les mots pour le dire sont féroces. Ils évoquent la vigueur du chirurgien qui arrache un œil ou ampute un membre afin de sauver le corps et lui permettre d’éviter de sombrer dans la mort. Mieux vaut entrer borgne, manchot, estropié, dans la vie promise que de sombrer dans la géhenne.
Sauver le message
L’Eglise de notre temps, en Occident, est sans doute à un tournant. Que faut-il faire pour la sauver ? Ont-ils raison ces clercs qui maintiennent des règles strictes dans les célébrations liturgiques ? Sans doute ont-ils, ce faisant, l’intention de sauver le bateau. Mais leurs efforts sont inutiles si l’Eglise qu’ils restaurent ne maintient pas, par-delà les signes qui rendent une religion visible, les paroles qui appellent l’humanité à se tourner vers la vie.
Michel Jondot
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Le pour et le contre
Mêlé
« Celui qui n’est pas contre nous et pour nous » dit Jésus.
Il n’y a pas d’autre alternative : ou bien on est contre le Christ ou bien on est pour lui mais on ne peut pas être des deux côtés à la fois. « Tous ceux qui ne sont
pas pour moi sont contre moi » dira Jésus, par ailleurs, dans l’évangile.
Pourtant, dans nos pauvres vies, le oui et le non nous paraissent si souvent mêlés. Nous sommes pour et contre, jamais tout à fait pour et jamais non plus totalement
contre. Nous sommes un peuple de tièdes, le peuple où la grisaille domine.
« La grisaille, dit Jésus, n’existe pas pour Dieu. La grisaille n’existe pas à mes yeux. Votre propre regard est obscurci et ne vous permet pas de discerner
le pour et le contre, le oui et le non. Pour vous, tout est gris mais pour Dieu, il n’en va pas ainsi. »
Dieu décèle dans notre tiédeur, dans notre grisaille, le oui et le non. Pour nous seulement, ils sont mêlés. Dieu sait ce qui, en chacun de nous, vient de lui et ce
qui lui fait obstacle. Dieu n’a pas le regard obscurci. Il sait distinguer la lumière des ténèbres.
Séparé
« Si ton pied t’entraîne au péché, coupe-le » dit Jésus à Jean, son disciple.
« Si ton pied ou ta main t’entraînent au péché coupe-les » ajoute-t-il. Ainsi, à ses disciples, Jésus enseigne à discerner ce qui, en leur propre corps, ne fait
qu’un avec Dieu et ce qui lui fait obstacle.
Jésus éduque le regard de ses amis. Il leur apprend à déceler dans la grisaille de leur existence, la part de lumière et celle des ténèbres. Jésus révèle
que la lumière et les ténèbres sont bien séparées depuis la création du monde.
Au premier jour, Dieu sépara la lumière des ténèbres et il appela la lumière « jour » et les ténèbres « nuit ». De jour en jour, pour ses amis
Jésus apprend à appeler les choses par leur nom. Il sort ses disciples de la confusion. Il nous enseigne à reconnaître dans quel esprit nous agissons.
Chacun, à la suite de Jésus, peut apprendre à séparer dans sa propre existence la lumière des ténèbres, le jour de la nuit. Chacun peut apprendre à appeler
les choses par leur nom, à déceler ce qui en lui est de Dieu et ce qui est contre, à discerner le oui et le non.
Inaltérable
« Celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vos le dis, il ne restera pas sans récompense. » Celui qui saura
déceler, derrière le péché qui habite l’Eglise et chaque croyant, cette part de lumière inaltérable, deviendra à son tour fils de lumière, fils du jour. Celui-là
honore Dieu, l’abreuve et le réconforte. Il lui fait oublier la peine et et la longueur des nuits.
Reconnaissons, avec l’aide de Dieu, en chaque homme l’enfant de lumière et abreuvons-le de reconnaissance. Croyons que ce petit a besoin de ce verre d’eau pour lui
redonner confiance. Consentons nous-mêmes à être abreuvés de reconnaissance par nos frères.
Plus nous reconnaîtrons le fils de Dieu vivant en nous-mêmes comme en chacun, plus nous pourrons distinguer, par contraste, cette complicité
avec le péché qui nous pousse à notre perte. Alors nous saurons couper court avec le mal qui nous entraîne dans la nuit. Nous entrerons dans la salle de noces
où les borgnes, les boiteux, les estropiés et tous les pauvres sont abreuvés de la tendresse de Dieu.
Christine Fontaine
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