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17ème dimanche du temps ordinaire
Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu
Mt 13, 44-52
Jésus disait à la foule ces paraboles : "Le Royaume des cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ; l'homme qui l'a découvert le cache de nouveau. Dans sa joie, il va vendre tout ce qu'il possède, et il achète ce champ.
Ou encore : Le Royaume des cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines.
Ayant trouvé une perle de grande valeur, il va vendre tout ce qu'il possède, et il achète la perle.
Le Royaume des cieux est encore comparable à un filet qu'on jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons.
Quand il est plein, on le tire sur le rivage, on s'assied, on ramasse dans des paniers ce qui est bon, et on rejette ce qui ne vaut rien.
Ainsi en sera-t-il à la fin du monde : les anges viendront séparer les méchants des justes
et les jetteront dans la fournaise : là il y aura des pleurs et des grincements de dents.
Avez-vous compris tout cela ? " - Oui », lui répondent-ils.
Jésus ajouta : « C'est ainsi que tout scribe devenu disciple du Royaume des cieux est comparable à un maître de maison qui tire de son trésor du neuf et de l'ancien. »
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Dieu serait-il mort ?
Michel Jondot
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Un trésor caché
Christine Fontaine
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Nous sommes faits pour la joie
Michel Jondot
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Dieu serait-il mort ?
Dieu est mort
Il y eut un temps, paraît-il, où dans notre pays Dieu s’imposait à la conscience. On avait peur de prononcer son nom tant sa majesté s’imposait à tous. Elle n’est pas si lointaine l’époque où les gestes de la vie étaient commandés par la foi. Les crucifix étaient sous les yeux des malades dans les hôpitaux et fixés sur les murs du tribunal : tout jugement était porté au nom de Dieu. La croix était aussi sous les yeux des malades dans les hôpitaux. Dans les écoles, les maîtres faisaient précéder leurs leçons en présidant la prière des enfants. Le temps était scandé par des fêtes religieuses. Ces temps- là sont révolus. A part chez ceux qui sont encore pratiquants, on ignore aujourd’hui que le dimanche est férié parce qu’il était, autrefois, jour consacré au Seigneur. La fête de Pâques n’est plus considérée comme la victoire de Jésus sur les forces de la mort mais un point de repère pour les vacances de printemps. Noël, pour le plus grand nombre, n’est plus que l’occasion de faire la fête et d’échanger des cadeaux. Qui se souvient qu’il y eut une époque où le 15 août était fête nationale ? A l’extrême fin du 19ème siècle, alors que l’Europe était entrée dans une période d’industrialisation impressionnante, un philosophe allemand portait ce diagnostic : « Dieu est mort ! »
Orienter son désir
Faut-il se désoler de cette déchristianisation ? Il convient de se rappeler le désarroi d’un homme au début du 20ème siècle. Issu d’une famille chrétienne, Charles de Foucauld avait déjà une certaine expérience de la vie. Il en connaissait les plaisirs : sa jeunesse dorée fut assez dévergondée. Il en connaissait aussi les exigences : un travail anthropologique au Maroc l’avait mis face à de grosses difficultés qu’il avait su traverser. Arriva le temps où l’absence de Dieu le bouleversa ; il en vint à faire cette prière : « Mon Dieu, si vous existez, faites que je vous connaisse. » La conversion célèbre de ce grand chrétien s’est réalisée en ce moment étrange où se croisaient une parole s’adressant à une personne précise, désignée par son nom (« Mon Dieu ») et perçue comme douteuse, voire absente (« si vous existez »).
Cette expérience de celui qui est devenu le Père de Foucauld aide peut-être à comprendre ces deux courtes paraboles. Le pays où l’on rencontre le Dieu dont parle l’Evangile et que Jésus appelle « Royaume de Dieu » est présent et Jésus le désigne : « Le royaume de Dieu est arrivé jusqu’à vous. » Mais en même temps ce royaume est à attendre et à chercher : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice. » Il s’agit d’une réalité qui est à la fois présente et absente. Ce mystère est bien illustré par l’histoire de ces deux hommes que l’évangile met en scène. L’un et l’autre connaissent ce qu’ils veulent : un trésor et une perle précieuse. Mais ils ne le possèdent pas ; pour l’un comme pour l’autre, ce qui oriente leur vie reste à trouver.
Ceux qui, de nos jours, croient encore ont à méditer ce qu’il faut bien considérer comme un mystère. Ne croyons pas que Dieu est là où nous l’imaginons : « Si l’on vous dit qu’il est ici ou il est là, n’y allez pas, n’y courez pas. » Ne nous hâtons pas, par exemple, quand nous avons à faire des choix en politique, de croire que la volonté de Dieu est ici ou là. En réalité, elle est à chercher. Ne croyons pas spontanément tous les beaux discours qui nous parlent de lui comme s’il s’agissait d’une vérité définitive. Nul ne le prend ni le comprend : jamais ce qu’on pourra dire de lui ne nous permettra de le tenir. Certains rassemblements liturgiques séduisent bien des chrétiens ; il est bon de rencontrer des communautés croyantes et de chanter ensemble à pleine voix, pleins d’enthousiasme, « alléluia ». Il n’est pas bon, en revanche, d’en rester là ; on ne peut aller vers lui qu’en marchant à tâtons. Jean de la Croix assimile la connaissance de Dieu à une source qu’il chante dans un poème célèbre : « Je la connais la source… cette source vive de mon désir… je la vois mais c’est de nuit. »
Dieu se dérobe et se révèle
« Désir » : c’est sans doute le mot qui convient pour désigner la quête de ce paysan qui connaît bien ce que renferme son champ ou de ce marchand qui a repéré la perle qu’il veut acquérir. Le désir est peut-être le lieu où Dieu se cache en même temps qu’il se fait connaître. Il traverse chaque personne humaine. En réfléchissant sur ce qui motive les choix de chacun, on s’aperçoit qu’il libère les énergies. On cherche à s’orienter à partir d’un but qu’on voudrait atteindre parce qu’il nous comblerait. Bien malheureux ceux qui sont déçus par la vie. En réalité, ne sommes-nous pas tous déçus ? Ceux qui détiennent la richesse ou le pouvoir, bien souvent ne sont jamais satisfaits. Rien ne leur suffit. En réalité « Dieu seul suffit » (Pascal) ; on ne le trouve que lorsqu’il habite notre désir.
Nous ne pourrons guère le rencontrer, en effet, que dans la mesure où nous sommes convaincus que les biens que nous visons ne peuvent jamais être un but ultime. En nous arrêtant à eux, en pensant qu’ils peuvent nous combler, nous nous leurrons. « Dieu est plus grand que notre cœur » ; il déborde infiniment ce que nous pouvons vouloir. On ne peut aller vers lui sans perdre les images que nous nous en faisons. Pour l’atteindre, il faut savoir abandonner ce que nous tenons en étant convaincu qu’il y a toujours mieux à espérer Le paysan de la parabole pour trouver son trésor ou le bijoutier pour acquérir la perle qu’il convoite, lâchent tout ce qu’ils possèdent.
Qu’est-ce que lâcher ? C’est donner, c’est se donner à autrui. On se trompe en prétendant que Dieu a disparu de nos sociétés autrefois chrétiennes. Autrui est toujours là ; c’est en nous donnant à lui que nous ne cessons d’entrer dans ce Royaume qui, semblant se dérober, en réalité ne cesse de s’ouvrir.
Michel Jondot
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Un trésor caché
Le discernement
Le Royaume de Dieu est comparable à un filet qu’on jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons Quand le filet est plein, on le tire sur le rivage, on s’assied, on ramasse dans les paniers ce qui est bon, on rejette ce qui ne vaut rien
Mais il faut l’œil exercé du pécheur, de l’homme qui connaît son métier, pour distinguer, lorsque le filet est plein, le poisson qui mérite d’être ramassé et celui qui ne vaut rien. Un homme sans expérience ne saura pas faire le tri. Il jugera peut-être d’après la grosseur du poisson, ou d’après son apparence, et il rejettera, sans les discerner, de bonnes prises.
Le Royaume des cieux est comparable à un négociant qui recherche des perles fines. Ayant trouvé une perle de grande valeur, il va vendre tout ce qu’il possède, et il achète la perle.
Il faut l’œil exercé du bon négociant pour déceler la perle rare qui vaut la peine d’être achetée. Si on est dépourvu d’expérience, il est insensé de vendre tout ce qu’on possède pour acheter une perle qui peut être précieuse, mais qui peut tout aussi bien être une imitation grossière. Il faut être fou pour se risquer dans une telle opération quand on n’est pas absolument sûr de ne pas se tromper. Mais celui qui est certain de ne pas faire erreur, celui qui a suffisamment d’expérience pour acheter une perle rare et qui préfèrerait garder ses anciennes richesses bien moins précieuses, celui-là serait vraiment insensé !
L’hésitation
« C’est ainsi que tout scribe devenu disciple du Royaume tire de son trésor du neuf et de l’ancien. »
Disciples du Royaume, nous avons le sens de notre intérêt. Nous connaissons ce trésor caché dans le champ du monde mais nous demeurons attachés à d’autres trésors. Nous croyons que la vie de Dieu, comme une source cachée, nous abreuve de jour en jour… mais nous puisons aussi fréquemment à d’autres sources. Nous pressentons que Dieu est notre joie, notre force et notre allégresse. Nous aspirons à ce bonheur qui surpasse toute autre richesse. Mais nous sommes rarement prêts à vendre tous nos biens pour acquérir ce bien qui les surpasse tous.
Nous sommes disciples du Royaume mais nous demeurons de pauvres scribes. Nous tirons de notre trésor du neuf mais aussi de l’ancien. Nous gardons nos anciennes valeurs, nos anciennes richesses, nos anciennes habitudes. Cette vie nouvelle est pour nous tellement contre nature ! Il ne nous est pas naturel de suivre l’Evangile, de le recevoir comme notre seul trésor. Il ne nous est pas naturel d’aimer nos ennemis, de bénir ceux qui nous maudissent, de ne pas revendiquer nos droits, de donner sans rien attendre en retour. Nos anciennes coutumes ont la vie dure. Nous pressentons que le bonheur est du côté de l’Evangile, du côté de la vie que Dieu nous propose. Nous tentons de suivre l’Evangile, mais nous butons. Nous connaissons la source, mais elle demeure souvent trop caché pour que nous nous risquions à la préférer à tout le reste. Nous n’avons pas suffisamment le sens de notre intérêt pour quitter nos anciennes valeurs.
La séparation
A la fin du monde les anges viendront séparer les méchants des justes et les jetteront à la fournaise : là il y aura des pleurs et des grincements de dents.
A la fin du monde les fausses valeurs qui nous retiennent dans le malheur seront brûlées. Nous ne serons plus sans cesse tiraillés entre la loi du monde et celle de Dieu. A la fin du monde, Dieu séparera en chacun ce qui est bon et ce qui ne vaut rien. Ce qui ne vaut rien mais à quoi nous attachions stupidement du prix, sera jeté au feu. Nous en serons débarrassés à tout jamais. Alors il n’y aura plus de pleurs ni grincements de dents
Mais sans attendre la fin du monde, de jour en jour durant notre existence terrestre où nous peinons à discerner ce qui ne vaut rien et ce qui est, en vérité, source de bonheur, Dieu nous délivre. Lorsque devant Dieu nous reconnaissons notre manque de discernement, il nous comble de son Esprit. Lorsque nous acceptons de nous en remettre à Lui pour qu’il nous découvre ce trésor caché, il nous mène à la source de nos désirs.
A ceux qui reconnaissent qu’ils ne valent rien, puisqu’ils sont incapables de renoncer aux fausse valeurs du monde, Dieu révèle qu’ils sont pour lui cette perle fine qu’il vient chercher dans le champ du monde. Dieu, par Jésus Christ, a vendu tout ce qu’il possédait ; il a renoncé à toutes les richesses du ciel et à toutes celles de la terre, pour acquérir cette perle précieuse que chacun représente pour lui. Dieu a le sens de nos intérêts et, sans attendre la fin du monde, si nous le voulons bien, il se charge de nous faire jeter par-dessus bord les mauvaises prises !
Christine Fontaine
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Nous sommes faits pour la joie
L'abandon
On connaît tous l'histoire de François d'Assise cheminant un jour d'hiver avec frère Léon alors qu'ils rentraient, au terme d'une tournée, dans cette sorte de petit couvent où logeait la première communauté franciscaine et qu'on appelait la Portioncule. François demande à son compagnon s'il sait en quoi consiste ce qu'il appelle « la joie parfaite ». Elle n'est pas selon lui dans le fait de posséder la foi; elle ne consiste pas à jouir du don de prophétie ni decla science de Dieu que possèdent les anges. Elle n'est même pas dans la réalisation de son voeu le plus cher : l'accroissement de ceux qui, à sa suite, épousent Dame Pauvreté et entrent dans la famille franciscaine. « Mais qu'est-ce que la joie parfaite ? »demande Frère Léon. François décrit alors ce qui se passerait si, arrivant à la Portioncule, le Frère portier refusait de les reconnaître, les empêchait d'entrer, les chassait à coups de gourdin et les laissait dehors dans la nuit et le froid et la neige. Ils auraient à faire l'abandon de tout ce qui pouvait leur permettre de tenir pour avancer sur le chemin. La joie parfaite pourrait naître de cet abandon.
Avec le mot « abandon », on peut entrer dans l'intelligence de cette page d'Evangile. Pour obtenir un trésor caché, un homme abandonne tout ce qu'il possède. Il le vend non parce qu'il veut se débarrasser de ce qu'il a mais parce qu'il y a mieux à attendre. De même ce joaillier n'a pas peur de tout perdre pour acquérir la perle rare. Lui aussi abandonne tout ce qu'il possède. Il y a mieux à désirer que les bijoux qu'il tient déjà. En prenant son troisième exemple, Jésus savait qu'il serait compris par ces amis qu'il avait appelés un certain petit matin quand il leur avait indiqué le bon endroit pour lancer le filet. Ils savaient ben, ces pêcheurs de Galilée, que lorsqu'on a traîné le filet sur le rivage il faut faire le tri, et abandonner le menu fretin qu'on rejette à la mer pour garder les beaux morceaux. « Avez-vous-compris tout cela ? » leur demande Jésus.
Se tourner du côté de la joie
François d'Assise avait compris que la vraie sagesse, quand on abandonne ce que l'on tient, c'est pour atteindre une joie plus grande. Quand on a tout perdu, quand il n'y a plus personne vers qui se tourner pour obtenir de quoi faire face aux intempéries reste à se tourner vers Dieu qui en Jésus s'est donné au monde. Quand on devient capable de tout perdre pour accueillir Dieu lui-même, la joie est parfaite. Ces paraboles d'aujourd'hui préparent les disciples à vivre les événements de la passion. Jésus abandonne tout. Il abandonne ses prérogatives de Fils de Dieu, comme dit Paul. « Père pourquoi m'as-tu abandonné ? » Il se reprend aussitôt pour s'abandonner tout entier à Celui dont Il veut faire la volonté : « Entre tes mains je remets mon esprit ». C'est pourquoi Dieu l'a exalté et qu'Il peut sauver la vie.
Nous ne sommes pas des François d'Assise et nous ne sommes peut-être pas capables de cet abandon héroïque qu'il a vécu. A coup sûr aucune personne humaine jamais ne pourra se vider aussi complètement de lui-même que Jésus abandonnant les privilèges de sa divinité. Il n'en reste pas moins que nous ne connaîtrons jamais la joie si nous ne faisons pas l'abandon au moins de nos images. Songeons par exemple à la tristesse qui nous envahit lorsque nous faisons l'expérience d'un échec. Nous faisions tel projet qui n'a pas pu se réaliser. Nous serions prisonniers de notre imaginaire si nous ne quittions pas les représentations que nous nous étions faites pour nous tourner du côté où la vie est donnée même si se côté est à trouver parce qu'il est caché comme un trésor dans un champ.
Abandonner ses rêves
Lâcher ce qu'on tient pour faire grandir la joie: n'est-ce pas la condition pour vivre en parents. Lorsque les enfants entrent dans la vie adulte, ceux qui les ont mis au monde souvent sont dépossédés de leurs attentes. Leur progéniture s'oriente autrement qu'on ne l'y préparait. Abandonner ce qu'on rêvait est souvent le plus beau cadeau offert à des jeunes qu'on aime. Ils acquièrent leur autonomie, leur indépendance ; quelle plus belle perle trouver?
En réalité, l'abandon auquel nous invite l'Evangile est une façon de vivre avec autrui. « Plus d'amour partant plus de joie », disait le poète. Il est vrai que devant autrui, il faut savoir se déposséder de toute emprise sur lui pour que la relation soit vraiment saine et source de joie. L'abandon auquel l'Evangile nous invite s'adresse peut-être d'abord à ceux qui disposent d'un pouvoir sur autrui. Grande est la tentation d'imposer ses vues, ses idées et de créer ainsi des situations regrettables.
Enfin, lorsqu'on regarde la marche du monde, lorsqu'on voit certains pays se crisper sur des territoires qu'ils ont conquis et dont ils ne veulent pas se déposséder, la colère gronde, la violence grandit et la mort étend son règne.
Nous ne sommes pas faits pour la mort mais pour la joie !
Michel Jondot
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